Droit de l'intelligence artificielle

Le système d'espionnage global de la Chine par l'IA en 2025

Comment la Chine pourrait-elle inspirer d’autres pays dans la surveillance des citoyens ? C'est la question que pose l'analyse qu'une équipe de journaliste du New York Times qui a mis en évidence déjà en 2022.

Notons que cette enquête suit la mise en application de la loi "PIPL" (le RGPD local) de 2021, qui impose des "règles strictes sur la collecte, le stockage et le partage des données personnelles" et sur le consentement. mais qui en exempte le gouvernement et prévoit, au contraire, les "conditions sous lesquelles les données peuvent être partagées avec les autorités."

Le législateur chinois a été très prolifique en la matière, cette année-là et a enchâiné avec La Data Security Law (DSL) de septembre 2021 qui vise à protéger les données sensibles et "à garantir la sécurité nationale"....

On savait déjà que Pékin pratiquait l'espionnage à grande échelle et était particulièrement porté sur le contrôle de ses citoyens. Mais l’enquête menée pendant un an par le New York Times sur la collecte des données pose de nouvelles questions : jusqu’où la Chine est-elle prête à aller pour assembler des bases de données biométriques complètes, et quelles leçons d’autres gouvernements pourraient-ils en tirer ?

Pourrait-on voir se répéter ailleurs l’exemple chinois de la centralisation des données ?

Selon les multiples appels d’offres analysés par le New York Times, le Parti communiste chinois (PCC) chercherait à regrouper à terme toutes les informations recueillies sur sa population. Ces appels d’offres, censément publics mais éparpillés en ligne, illustrent les attentes de Pékin : les autorités veulent tout acheter, des caméras les plus perfectionnées aux logiciels d’analyse et de reconnaissance.

D’autres nations regarderont-elles de près l’usage des nouvelles technologies par la Chine ?

Une présentation récupérée auprès de Megvii, entreprise spécialiste de la reconnaissance et du deep learning, démontre l’existence d’un logiciel capable de centraliser des données très diverses : mouvements, vêtements portés, véhicules utilisés, relations sociales, etc. Officiellement, Megvii nie vouloir cibler un individu en particulier. Pourtant, la police chinoise exploite déjà ces fonctionnalités. Dans le même temps, un autre appel d’offres souligne la volonté du gouvernement d’améliorer la mise en commun des données. Cela ne pourrait-il pas inspirer d’autres États intéressés par les mêmes capacités ?

La reconnaissance faciale généralisée : un modèle pour d’autres gouvernements ?

De nombreux documents décrivent précisément les objectifs fixés par les autorités chinoises en matière de reconnaissance faciale. On y apprend notamment que près de la moitié du milliard de caméras de surveillance en fonctionnement dans le monde se trouveraient en Chine. Les dispositifs sont prioritairement installés dans les endroits liés aux besoins essentiels (restaurants, magasins, loisirs), mais la police cherche également à en installer dans les résidences et hôtels pour affiner au maximum le maillage de surveillance. Des chaînes étrangères, comme Sheraton ou Days Inn, ont même dû se conformer aux réglementations locales et partager des données sur demande des autorités.

Est-ce que d’autres pays adopteront des réglementations similaires, obligeant des entreprises internationales à fournir des informations sensibles sur leurs clients ?

Cette approche marque-t-elle le début d’une tendance où l’État exige un accès systématique aux données privées, sous prétexte de sécurité ?

Quel usage pour les IMSI-catchers et le WiFi sniffing ?

Les documents révèlent aussi un recours massif à des dispositifs comme les IMSI-catchers, qui interceptent les communications mobiles en incitant les téléphones à se connecter. Ils décrivent également l’utilisation de « renifleurs » de WiFi, capables de capter des informations depuis une box Internet. Certains de ces traqueurs télécoms ont été employés pour collecter les noms de profils sur les réseaux sociaux à Pékin, tandis que dans la province du Guangdong, ils servent à repérer l’usage de dictionnaires ouïghour-chinois.

Peut-on imaginer d’autres gouvernements procédant à un suivi aussi poussé pour leurs propres objectifs de sécurité et de contrôle ?

Ces technologies, déjà disponibles sur le marché, constitueront-elles un futur standard de surveillance numérique à l’échelle mondiale ?

La lutte contre la criminalité : simple prétexte ou tendance mondiale ?

Pékin affirme que la collecte de données sert avant tout à renforcer la sécurité, faciliter les enquêtes et soutenir l’appareil judiciaire. Mais un appel d’offres illustre déjà la volonté d’aller plus loin : les autorités cherchent à obtenir des enregistrements de voix jusqu’à 100 mètres de distance, pour ensuite constituer des bases d’empreintes vocales.

D’autres puissances adopteront-elles elles aussi une surveillance vocale généralisée ?

À quel point ce genre de mesures, justifiées par la lutte contre la criminalité, pourraient-elles être employées à d’autres fins ?

Quelle place pour les minorités et la discrimination ?

Dans la région du Xinjiang, fief du peuple ouïghour, une base de données de 30 millions d’empreintes d’iris a été constituée dès 2017, et l’entreprise attributaire du marché aurait remporté d’autres contrats similaires dans le reste du pays. L’ADN de la population est aussi collecté à une échelle impressionnante : 25 des 31 régions de Chine possèdent déjà des bases de données rassemblant l’ADN de tous les hommes, dans la continuité d’un projet lancé dès 2014 dans la province du Henan.

D’autres gouvernements s’intéresseront-ils à ce type de collecte biométrique de masse, notamment pour surveiller des populations considérées comme « à risque » ?

Quels garde-fous internationaux pourraient empêcher la multiplication de telles pratiques ?

La Chine, un exemple technologique… au service d’un modèle de surveillance global ?

La mise en place d’un système de surveillance aux dimensions sans précédent soulève de nombreuses interrogations : d’autres pays pourraient-ils être tentés de suivre la voie ouverte par la Chine ? L’exemple de Pékin montre en tout cas la faisabilité technique et l’ambition politique d’une surveillance généralisée, qui dépasse la simple quête de sécurité pour se transformer en un outil de contrôle global de la population.

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