Transformation digitale

Affaire Uber files: scandale, lobbying et Macron l'américain

Les Uber files sont révélateurs de la dernière décennie de l'économie française: des politiques économique sous l'influence des lobbies. Est-ce un bien ou un mal.

Résumé de l'affaire "Uber files"

Suite à la communication de dizaines de milliers de documents par Mark MacGann, un lobbyist d'Uber repenti (d'abord salarié, puis consultant d'Uber), un consortium internationaux de journalistes a publié une série d'enquête décrivant les pratiques de la société Uber. Cela a permis au grand public dans la plupart des pays développés de découvrir l'envers du décors que seuls les initiés de l'ecosystème start up connaissait:

1/ Uber est une entreprise pour qui la fin justifie les moyens

2/ Uber a délibérément enfreint la loi dans tous les pays où elle s'est implantée et a passé de lourdes provisions pour risques juridiques,

3/ Uber s'est appuyé sur des alliés politiques ultra libéraux pour obtenir une évolution réglementaire permettant de légaliser les pratiques d'Uber,

4/ Uber a trouvé, en France, un allié de poids dans le ministre de l'économie française de l'époque, Emmanuel Macron, qui était fasciné par les start ups américaines ultra capitalisées et qui souhaitait depuis longtemps faire sauter le monopole des taxis,

5/ Uber n'a pas tenu une seule des promesses faites à ses investisseurs, alliés politiques ou partenaires chauffeurs

6/ Uber a tenté par tous les moyens d'échapper à l'impôt.

Les réactions face aux révélations des Uber files

Les réactions négatives sur les Uber files

Les politiques plutôt de gauche crient au scandale, parce qu'Emmanuel Macron a rencontré de manière secrète, plusieurs cadres de la société Uber, dont son fondateur, Travais Kalanik.

C'est un scandale d'état aux dires des

Par ailleurs, Emmanuel Macron aurait demandé à la société Uber de rédiger des amendements concernant une loi ciblant directement les activités Uber, afin qu'il les fasse passer via un député acquis à la cause d'Uber.

Et, ce, dans un contexte où l'entreprise opérait dans l'illégalité et qu'elle était sous l'objet d'une enquête des services d'autres ministères. Or, Emmanuel Macron a rencontré les dirigeants de l'entreprise Uber pour les aider à défendre ses intérêts sans en avertir les autres ministres concernés.

Par ailleurs, le lobbyist à l'origine des révélations a réalisé le don maximal autorisé par la loi (soit 7500€) à En Marche, mais a surtout organisé des dîners de fundraising dans l'écosystème digital, au profit d'En Marche qui ont vraisemblablement permis de lever plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Les réactions en faveur d'Uber

Les réactions pro Uber à la publication de cette enquête, de nombreux chroniqueurs et hommes politiques "libéraux" ont pris le parti d'Uber et se résume à quelques arguments

1/ Uber a fait du lobbying comme les autres sociétés qui utilisent le lobbying

2/ Uber est excusable car la société a permis la création de milliers d'emplois

3/ Emmanuel Macron n'a rien caché et joué son rôle de ministre de l'économie

L'argument en faveur d'Emmanuel Macron le plus infondé revient à Marlène Schiappa: à force de crier au scandale, le mot perd de son sens. En gros, lorsqu'il y aura un véritable scandale

L'argument le plus malhonnête vient d'Aurore Bergé: "tout a été fait dans la transparence, par Emmanuel Macron, aucun rendez-vous secret n'a eu lieu, on ne pouvait demandé à Emmanuel Macron d'obliger tous ses visiteurs à s'enregistrer à l'accueil du ministère de l'économie.

L'absence de réaction face aux Uber files

Dans le monde du digital, les réactions sont un peu molles car les professionnels du digital dominés par une pensée libérale ont globalement des difficultés à critiquer les géants du numérique américains. La critique des grandes sociétés américaines est souvent abusivement ramenées à la critique du succès et de l'enrichissement. Toute critique de ces sociétés est, souvent perçu comme suspecte.

La réalité derrière les Uber files

On peut prendre du recul pour essayer de se forger une idée sur cette affaire en se posant des questions basiques:

  • Si toutes les entreprises se comportent comme Uber et ne respectent pas la réglementation en vigueur (protection sociale, respect de l'environnement, qualité de service, protection du consommateur...) au motif qu'elles créeraient des emplois (précaires), que se passe-t-il ? C'est simple, les concurrents sont obligés de s'aligner sur un moins disant, soit ils disparaissent.
  • Est-ce que la condition de la majorité de nos concitoyens s'est améliorée depuis que Uber existe ? A l'évidence non, sauf si l'on part du principe que se faire livrer des pizzas à domicile par des livreurs payés au lance pierre et ne cotisant à rien, améliore la société.
  • Le modèle Uber vise à créer une situation de monopole afin de permettre l'enrichir d'une poignée d'actionnaires et de fondateurs d'Uber en imposant des tarifs et des conditions inéquitables aux consommateurs comme aux chauffeurs. Cela va contre les principes de l'économie de marché et à l'encontre de la lutte pour la réduction des écarts de richesse.
  • Uber s'est fait passer pour une entreprise technologique qu'elle n'est pas, afin de pouvoir lever de l'argent (pour installer des monopoles locaux) dans des conditions plus avantageuses que les entreprises classiques.
  • Comment se fait-il qu'une entreprise tellement vertueuse, se targuant de révolutionnerr le monde des transports (pour le mieux, évidemment), n'est toujours pas rentable ? En dépit de tous les capitaux injectés, du fait qu'Uber n'assure aucun protection à ses chauffeurs, du fait qu'Uber ne paie aucune cotisation sociale et qu'elle reverse des commissions à ses chauffeurs de plus en plus faibles, la société, 13 années après sa création n'est toujours pas rentable et de très loin : pour un chiffre d'affaires trimestriel de $6,85 milliards sur le 1er trimestre 2022, la société a perdu $5,93milliards. C'est un business model non efficace du point de vue économique. Pour une start up qui prétend révolutionner le secteur du transport, c'est particulier. On comprend qu'une start up explorant un nouveau business model perdent de l'argent pendant quelques années, le temps de valider son business et de réaliser les ajustements nécessaires. Mais 13 ans plus, perdre l'équivalent de son chiffre d'affaires, est inexplicable.
  • Est-il souhaitable que des entreprises, dont la mission, n'est pas, par définition d'écrire la loi, rédigent des amendements ?
  • Est-il normal que le ministre de l'économie, demande à une entreprise de rédiger un amendement à un projet de le loi et mente devant l'assemblée en présentant cet amendement comme ayant été rédigé par le député socialiste Luc Belot ?

Bref, au délà du fait qu'Emmanuel Macron n'a pas été  très visionnaire en misant sur une société dont le business model est mauvais, il a menti devant l'assemblée nationale. Cela est répréhensible. Ces arrangements entre Emmanuel Macron et la société Uber se sont faits dans la plus grande discrétion, pour ne pas dire opacité, probablement, pour ne pas attirer l'attention des ministres qui étaient contre les agissements d'Uber, à l'instar du ministère des transports de l'époque.

Bref, on pourrait résumer l'affaire des Uber Files à 4 questions

Notre pays a-t-il besoin d'une société Uber ?

Notre démocratie se porte-t-elle mieux si des entreprises privées ne respectent pas la loi ?

Notre démocratie se porte-t-elle mieux si ce sont des sociétés qui rédigent les lois dans leurs intérêts et non dans l'intérêt du bien commun ?

Notre économie a-t-elle besoin d'entreprises étrangères qui sont chroniquement déficitaires ?

 

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